aloisia, marzia ◊ ”i've come too far to see the end now, even if my way is wrong, i keep pushing on, and on, and on, and on. there's nothing left to say now.” |
« C'est un défi ? » Elle ne savait même plus ce qui c'était passé, ce qui leur était arrivé, ni quand ni comment.
« C'est un défi ? » Elle se souvenait juste de ces quelques mots qu'elle avait lancé d'une grande voix, l'air joueur. Marzia aimait les défis, elle n'était pas du genre à se rétracter au dernier moment – elle était plus de celles qui foncent et font tout pour gagner. Elle en tire peut-être son côté mauvais joueur, sa haine de l'échec quel qu'il soit.
« C'est un défi ? » Ça résonnait bêtement dans sa tête alors qu'elle essayait tant que possible de se souvenir de tout ce qui était arrivé, sans succès. Elle avait parié une paire de boucles d'oreilles en or rose, qu'elle n'avait cessé de porter tout au long de son adolescence, et elle ne savait même plus de quoi il en retournait – mais elle savait qu'elle avait bien fait.
Elle avait toujours su qu'elle avait bien fait d'accepter ce pari, puisqu'il l'avait conduite dans une paire de bras doux et chaleureux qu'elle aurait aimé ne jamais quitter. Contrairement à d'autres relations que Marzia tient à présent en horreur, elle portait sur celle-ci un regard bienveillant, gardait une certaine affection pour ce qui avait été. Ça n'avait pas duré longtemps –
pas assez longtemps au goût de son cœur – mais ç'avait été une jolie petite histoire. Une de celles qu'elle ne raconte pas, qui ne regarde qu'elle(s).
« C'est un défi ? » Un sourire éclot sur le visage de la Monaci. Elle se souvenait de son cœur qui s'emballait quand elle se savait reflétée dans la paire d'yeux de la rousse, quand elle effleurait sa peau laiteuse presque trop doucement. Elle n'avait pas été la princesse exigeante, méprisante et blessante, pas cette fois-là – et elle était, à ce jour, toujours incapable de se l'expliquer. C'était juste différent. La douceur et la beauté flamboyante de son amante d'un temps l'avait peut-être calmée. Elle avait peut-être vu qu'elle avait beau être odieuse, se faire remarquer et tout ce qu'elle voulait, elle ne brillait jamais autant que celle qui avait commencé à faire chavirer son cœur.
C'était peut-être l'excitation de la chose en elle-même qui la détraquait un peu. Se savoir dans l'interdit, dans le secret – parce qu'elles étaient toutes les deux promises, depuis toujours; parce qu'elles pouvaient être princesses tant qu'elles le voulaient, l'on avait jamais vu dans leurs livres de contes deux princesses couler ensemble des jours heureux. C'est peut-être ça qui faisait que ça marchait – jusqu'à ce que ça ne marche plus.
Elle ne savait plus comment tout ça avait commencé, mais elle ne savait plus non plus comment ça c'était terminé. Probablement avec autant de douceur, comme si tout ça n'avait été qu'une aventure dans un royaume de coton, loin de tout le reste; et elle n'en gardait alors qu'un souvenir doux et édulcoré. C'était comme se souvenir d'un beau cadeau avec une pointe de mélancolie.
« C'est un défi ? » Un simple regard lancé à travers le restaurant suffisait à lui rappeler tant de choses qu'elle en perdait le fil de la conversation. Marzia humait son vin, faisait mine d'écouter ce qui se disait à sa droite et à sa gauche avant de déguster une gorgée d'alcool pourpre. Elle ne répondait que par « oui » et par « non », coulant quelques regards vers la silhouette de feu qui se dessinait à l'autre bout de la salle, jusqu'à la voir se lever et passer la porte. Marzia se leva à son tour, son repas fini, et raccompagna l'une des amies avec qui elle avait plus ou moins partagé ce moment à l'extérieur.
À peine sorties, Marzia enfouit ses mains dans les poches de son manteau de fourrure, sonda une silhouette qui attendait là du regard, jusqu'à en attirer le sien.
Bonjour, Marzia. Bon restaurant, n'est-ce pas? Elle était toujours aussi belle, rayonnante et solaire, mais quelque chose manquait à son sourire – quelque chose d'encore bien vivant dans ses souvenirs. D'une voix douce, Marzia souffla.
Le meilleur de la ville, bien entendu. Un sourire étira ses lèvres toujours parfaitement teintées de rouge.
Bonjour, Aloisia. Pour peu, si elles n'avaient pas été au beau milieu d'une rue passante, Marzia lui aurait probablement baisé la main. Elle s'avança plutôt vers l'incendie vivant qui la fixait froidement.
Il y a bien longtemps que je ne t'avais pas vue en dehors des réceptions mondaines. C'était probablement la première fois depuis... depuis. D'un simple regard, moins jugeur que ceux qu'elle avait l'habitude de lancer, Marzia détailla Aloisia de la tête aux pieds.
Tu es splendide.