en français, s'il te plait. du haut de ses douze ans, eloïse était déjà en âge de comprendre. elle comprenait qu'elle occupait une haute place; petite privilégiée née avec une cuillère en argent dans la bouche. elle comprenait que l'héritage familiale était importante, que c'était grâce à ses ancêtres qu'ils en étaient là aujourd'hui. elle comprenait désormais tout ce qu'on lui avait rabâché depuis des années. déjà à cette époque, elle vivait dans son coin, tout en prenant néanmoins soin de se comportait comme il se devait en publique. elle n'était qu'une enfant. elle ne voulait pas grandir. elle avait tout le temps pour ça. dois-je également utiliser l'italien pour parler à mère? derrière cette voix innocente qui aurait pu en duper plus d'un, se cachait un réel sarcasme. le patriarche n'était pas dupe, évidemment. il avait appris a déceler la moindre humeur de sa fille. dans le cas présent, elle faisait tout simplement sa tête de mule. il ne se fâcha pas pour autant, gardant la même expression sur son visage. presque, puisqu'il semblerait que ses lèvres s'écartèrent très sensiblement. en français, s'il te plait.


elle avait traversé tout le palais en pleine nuit. pas un bruit ne se faisait entendre, l'endroit semblait si paisible. elle n'arrivait pas à dormir. elle s'était tournée, encore et encore dans son lit. puis, elle s'était levée et était partie s'enfermer avec sa peinture. quelques minutes à peine, avant de quitter ses appartements. elle avait laissé ses pas la guider, pour se retrouver devant la porte de son frère. elle se faufila à l'intérieur, jusque dans sa chambre. il était seul ce soir-là, ce qui fut un énorme soulagement. discrètement, elle se glissa sous les draps, et vint se blottir contre lui. que fait-on d'une carcasse d'animal? elle chuchotait, de peur de briser ce doux silence. il l'entendit, cependant, puisque ses sourcils se froncèrent. il bougea un peu, légèrement déboussolé. elle avait fumé. bien sûr qu'elle l'avait fait. mais il s'agissait bien d'une réelle question. il finit par le réaliser, le temps que la brume se dissipe. bobby? elle ne s'était jamais posé la question auparavant. jusqu'à ce qu'elle tombe sur le cadavre de son propre animal. un furet qu'elle a gardé pendant neuf années – la prunelle de ses yeux. elle était tombé sur lui en faisant ses courses pour sa première année à goldadler. il était d'un blanc, comme ses cheveux – plus que ses cheveux à vrai dire, mais la fillette qu'elle était n'avait que cette idée en tête. elle en était tombée instantanément amoureuse. son aîné passa un bras autour d'elle, et la serra un peu plus contre lui. je m'en occupe.


l'odeur de peinture émanait de toute la pièce. une chambre d'amie, dont elle avait fait retirer tout le mobilier pour aménager cette pièce à sa convenance. un atelier toujours désordonné, représentatif de ses idées. des chevalets, des toiles inachevées, des pots contenant divers pinceaux, d'autres remplis d'eau, et même des cendriers – pleins pour la plupart, et bien plus qu'il n'en fallait. dans un coins de la pièce se trouvait une banquette qui servait de canapé. elle tenait à se côté rudimentaire, bien loin de la décoration du reste de ses appartements. son antre secrète que peu avaient le privilège de pénétrer. ne me dis pas ce que tu en penses. assise sur un tabouret, eloïse examinait consciencieusement sa dernière peinture, finalement achevée quelques jours auparavant. c'était son truc à elle – ou peut-être était-ce un truc d'artiste – que de scruter ses oeuvres jusqu'à en être dégoûtée. elle finit par se lever, pour rejoindre la brune assise non loin; nour. c'est pourtant une très jolie– désormais installée à ses côtés, la blonde posa délicatement son index sur les lèvres de sa compagne. une seconde à peine, avant qu'elle ne s'approche pour le remplacer par ses lèvres. un doux baiser, qui ne dura qu'un court instant puisqu'elle se détacha de nouveau très vite, juste assez pour que leurs lèvres ne se touchent plus. ne me dis pas ce que tu en penses.